CFDT Groupama Nord-Est


lundi 13 mai 2013

Pétition de soutien à 3 médecins du travail (Drs E. DELPUECH, D. HUEZ et B. BERNERON)

Article paru dans le site : lemonde.fr (6 mai 2013)

Plaintes contre trois médecins du travail devant le conseil de l'Ordre

Mardi 7 mai, Dominique Huez ne se rendra pas à la convocation du conseil de l'Ordre des médecins d'Indre-et-Loire. Médecin du travail à la centrale nucléaire de Chinon (Indre-et-Loire), il ne veut pas s'expliquer devant une "commission de conciliation" avec un employeur, la société Orys, sous-traitante de la centrale, qui a déposé plainte contre lui.

On reproche à M. Huez davoir délivré à un des salariés d'Orys un certificat attestant du lien entre son état de santé psychique et ses conditions de travail. Selon la plainte, M. Huez n'aurait pas respecté, dans son certificat, la notion de prudence et de circonspection.
"Je suis tout à fait d'accord pour m'exprimer avec l'Ordre sur ma pratique déontologique, mais pas devant l'employeur, indique M. Huez. Il m'est interdit par la loi de donner à l'entreprise la moindre information sur la santé d'un de ses salariés."
Ce salarié avait produit ce certificat dans le cadre d'un contentieux prud'hommal pour harcèlement moral qui l'oppose à son employeur.
Actuellement, trois médecins du travail font l'objet de plaintes similaires d'employeurs, dont EDF. L'une d'elles a déjà abouti à un blâme, qui fait l'objet d'un appel.

 "FAIRE LE LIEN ENTRE TRAVAIL ET SANTÉ, C'EST LE RÔLE MÊME DU MÉDECIN"
Ces procédures disciplinaires scandalisent le milieu des médecins du travail, soucieux de défendre leur indépendance vis-à-vis des employeurs et leurs pratiques professionnelles.
Les médecins poursuivis sont soutenus par plusieurs associations et par le Syndicat national des professionnels de santé au travail (SNPST), ainsi que par une pétition, mise en ligne samedi 5 mai.
"Faire le lien entre travail et santé, c'est le rôle même du médecin du travail, son cœur de métier", atteste Pierre Abéccasis, médecin inspecteur du travail en Bourgogne, dont la fonction consiste à contrôler les services de santé au travail.
Le médecin du travail doit pouvoir "attester de ce lien et il a même l'obligation d'en informer le salarié et de lui permettre d'en obtenir réparation lorsque la pathologie est avérée", observe le SNPST, soulignant que "bien sûr, certaines constatations peuvent aller à l'encontre des intérêts d'un employeur, en particulier lorsqu'elles amènent à pointer des pratiques managériales dangereuses pour la santé des salariés. C'est pour cette raison que l'indépendance professionnelle des médecins (...) est garantie par la loi."
Les médecins du travail, qui soutiennent leurs collègues, estiment aussi que leur ordre ne doit pas entrer dans ce jeu. "Il n'a pas à instruire ce genre de plainte d'employeur, qui relève des tribunaux de droit commun, pour fausse déclaration, par exemple, estime M. Abécassis. L'ordre ne peut instruire que les plaintes venant de patients ou de confrères. Le chef d'entreprise n'est pas le patient du médecin du travail."
Et ce dernier, comme tout médecin, est, selon le code de déontologie de la profession, "au service de l'individu et de la santé publique".
"A partir du moment où l'auteur de la plainte considère que le médecin commet une faute déontologique, le conseil de l'ordre la traite et dans ce cas, la procédure de conciliation entre les parties est obligatoire", se défend Michel Fillol, secrétaire général adjoint du conseil national de l'ordre des médecins.

"ON TAPE SUR UN OU DEUX MÉDECINS POUR EFFRAYER TOUS LES AUTRES"
Les pressions des employeurs sur les médecins du travail ne sont pas nouvelles. "C'est leur quotidien, ils s'en débrouillent, constate M. Huez. Mais ce qu'ils redoutent, c'est la sanction par la chambre disciplinaire du conseil de l'ordre. C'est la honte d'être stigmatisé comme un médecin qui ne respecte pas l'éthique. Les employeurs l'ont bien compris : on tape sur un ou deux médecins pour effrayer tous les autres et les empêcher ainsi d'attester du lien entre le travail et la santé."
Pour le syndicat national CGT des médecins du travail des industries électriques et gazières, dont M. Huez est le secrétaire général, la plainte contre ce médecin et celle d'EDF contre un autre, très actif aussi au sein d'un collectif de médecins du travail, ces actions sont là pour l'exemple.
Le syndicat y voit la preuve dans les motifs avancés par Orys, dont l'avocate écrit : "Si la société Orys a décidé de déposer plainte contre le docteur Dominique Huez, c'est afin d'éviter de telles dérives qui apparaissent de plus en plus souvent dans les procédures prud'homales" où des salariés produisent des certificats médicaux à leur appui.
Pour le syndicat, "le patronat veut déclencher un réflexe de peur et d'abstention de témoignage chez les médecins du travail."
Sollicitées, les sociétés Société Orys et EDF n'ont pas répondu à nos demandes.

Signez la pétition d'alerte et de soutien pour permettre aux médecins du travail d'attester d'un lien de causalité entre le travail et l'atteinte à la santé
POUR SOUTENIR les Drs E. DELPUECH, D. HUEZ et B. BERNERON